Touristes hispanophones transportant un violon géant. |
Deux hommes portant un matelas discutent en espagnol en passant devant moi, vers ma gauche. Le plus vieux des deux semble vouloir expliquer quelque chose au plus jeune, qui l'écoute poliment, répondant un ou deux mots à l'occasion. Quelques minutes plus tard, ils repassent en sens inverse, jasant toujours avec la même vigueur. Puis je les entends revenir. Cette fois, ils portent une étagère. Ce sera ensuite une armoire, puis un divan, puis un autre meuble. Puis un téléviseur. Ainsi de suite. Peut-être aurais-je compris quelque chose à leur conversation s'ils étaient restés devant, un peu, au lieu de disparaître à gauche et à droite sans cesse...
Le son d'un violon me parvient à travers la fenêtre ouverte d'un appartement que je ne parviens pas à identifier. Il semble provenir de l'édifice qui se trouve juste en face. M'attendant au pire, je maudis ma paresse et la chaleur ambiante, qui combinent leurs efforts pour faire en sorte que je n'aie aucune envie de me lever pour aller fermer la fenêtre de mon salon. Je suis ravi de constater que le violoniste s'est beaucoup amélioré depuis l'an dernier. J'envisage d'aller l'écouter de plus près et de lui témoigner ma gratitude pour la bonne idée qu'il a eue de s'exercer tout l'hiver, la fenêtre fermée. Mais il fait chaud et je suis paresseux, alors je me contente d'apprécier à distance.
«Tu trouves pas qu'on parle fort?» C'est la voie rauque d'une jeune fille qui s'adresse aux quelques personnes qui l'accompagnent, sur le trottoir devant chez moi. «On s'en crisse, on est à Montréal, on a le droit de parler fort! Hein, l'gros?» Je tente alors de cesser d'entendre, en espérant qu'ils se décideront à marcher un peu plus vite pour que le reste de leur lumineuse discussion se noie rapidement dans un subtil effet Doppler. À travers leurs rires gras et leurs observations de jeunes touristes ignorants, je me prends en flagrant délit de partialité en ne m'étonnant pas de reconnaître distinctement un riche accent de la Vieille Capitale.
C'est ainsi que le son voyage drôlement bien au coin de St-Hubert et Laurier.
P.S. L'image représente plutôt des musiciens transportant une contrebasse lors d'un festival du film à Cuba. (Getty)
2 commentaires:
L'effet Doppler, je ne connaissais pas. Intéressant.
Je doute que des passants en produisent réellement un, cependant.
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