8 novembre 2009

Accident de taxi

Nous sommes en janvier 2002. Je travaille coin Drummond et René-Lévesque, et comme c'est souvent le cas, je me dirige vers le boulevard de Maisonneuve après avoir terminé, à 23 heures.

À cette époque, on trouve encore le Mad Hatter Library Pub, justement au coin de Drummond. Il déménagera sur la rue Crescent quelques années plus tard. Chaque soir, un spécial dément promet une soirée peu coûteuse. J'y passe donc la soirée, à lire le Mirror en regardant Teletoon en anglais, chaîne qui n'est pas encore disponible là d'où je viens.

Arrive finalement le moment de quitter, trop tard pour attraper le métro vers Longueuil encore une fois. Je hèle donc un taxi et je lui donne mon adresse à Saint-Lambert. Jusqu'ici, tout va très bien.

Le chemin le plus court nous mène naturellement à emprunter le pont Victoria. La surface de ce pont est faite d'un treillis métallique, et non d'asphalte comme sur les autres ponts vers la rive sud. Conséquemment, il faut se méfier de l'adhérence dans ses voies étroites, bordées d'une part par la voie ferrée du CN, et de l'autre, par un bas garde-fou qui nous empêcherait théoriquement de tomber dans le fleuve en cas de fausse manoeuvre.

Assis sur la banquette arrière, du côté droit, je constate que mon chauffeur n'a pas froid aux yeux en voyant l'aiguille de l'indicateur de vitesse frôler les 90 kilomètres à l'heure. Inutile de préciser que la voiture oscille dangereusement.


Puisque le pont Victoria enjambe une écluse, il se sépare en deux routes distinctes, permettant de ne pas immobiliser le trafic lorsqu'un bateau entre dans l'écluse. À un certain point, près du côté sud, une pente asphaltée surplombe la voie alternative du chemin de fer, qui sert lorsqu'un train doit passer alors qu'un bateau bloque la voie principale.

C'est à ce moment que je commence à comprendre que mon chauffeur est probablement plus intoxiqué que moi. Je m'inquiète un peu et je m'agrippe fermement à la poignée à l'intérieur de la portière.

Du haut de la pente asphaltée, qui redescend vers notre destination, je constate que la voie principale pour les voitures est également barrée. C'est une barrière entourée et surplombée de signaux lumineux clignotant, nous invitant à tourner à droite, qui me fournit cette information. Mon chauffeur ne semble cependant pas s'en rendre compte, étrangement.

C'est juste avant la séparation des deux voies qu'il réalise le désastre qui se dessine. Il émet un «fuck!» assez révélateur et donne un coup de volant vers la droite. En guise de résultat, la voiture dérape et frappe à pleine vitesse le muret de métal qui délimite l'embranchement, avant de soubresauter sur quelques mètres, puis de s'arrêter.

Vue du lieu de l'impact. En plein jour, la barrière est assez claire. La nuit, les feux à droite et à gauche clignotent, tout comme les flèches situées en haut. La deuxième barrière qu'on peut voir derrière les feux à droite était également abaissée. C'est plutôt clair.

Secoué mais indemne, j'observe les dégâts causés par la collision. L'impact a défoncé la portière arrière gauche, qui se trouve maintenant à quelques centimètres de moi. Je n'ose pas émettre d'hypothèse quant à la tournure des événements si j'avais été assis à gauche. La roue arrière du même côté ne se trouve plus sous la voiture. Elle a roulé dans l'autre direction, pour s'immobiliser au pied de la barrière.

Ni le chauffeur, ni moi n'avons de téléphone sans fil. Je lui annonce donc que je vais tenter d'intercepter un automobiliste afin d'appeler la SQ, qui possède l'exclusivité des remorquages sur les ponts. L'opération s'avère périlleuse, car notre position nous rend invisibles, en pleine nuit, à ceux qui arrivent par le même chemin que nous avons emprunté. Le premier passant me permet d'utiliser son téléphone et des secours nous sont dépêchés.

Je me retourne afin d'annoncer la bonne nouvelle au chauffeur, pour me rendre compte qu'il est allé chercher sa roue, l'a placée à l'endroit où j'étais assis il y a quelques instants, et a décidé de fuir les lieux sur trois roues. Heureusement, je le rattrape à la course et je lui explique que ça n'a aucun sens.

C'est à cet instant qu'arrive un travailleur du CN au volant de son camion. Il s'immobilise derrière la voiture et je le mets au courant de ce qui vient de se produire. Pendant ce temps, le chauffeur panique à l'idée que c'est la Sûreté du Québec qui viendra nous secourir. J'en profite pour aller visiter son poste de conduite afin d'y trouver une flasque ou une bouteille qui viendrait confirmer mes soupçons, mais en vain.

Lorsque le premier policier arrive, je lui affirme n'être pas blessé et lui donne un indice de l'ébriété manifeste de celui qui a été mon conducteur.

L'homme du CN repart, et comme il se dirige vers la gare de Saint-Lambert, je monte avec lui. J'habite justement en face de la gare en question, ce qui est une chance inouïe dans le contexte.

Je ne sais pas ce qu'il advient du chauffeur de taxi par la suite. Pour ma part, je m'en tire avec un solide cafard pour les jours à venir.

À partir de ce moment, je n'emprunterai que des Taxi Coop, qui ne m'ont jamais réservé ce type de mauvaise surprise.

Et je m'assoirai dorénavant toujours du côté droit de la banquette arrière.

0 commentaires:

Publier un commentaire